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Jews & Arabs

Kacimi-El-Hassani est un écrivain et dramaturge né en 1955, à la zaouïa d'El Hamel, une cité des Hauts plateaux d'Algérie. Il est notamment l’auteur d’une encyclopédie du Monde arabe parue aux éditions Milan, 2001. Il indique en commentaire de son post partagé ci-dessous que sa source serait l'Observatoire du Moyen-Orient.



Mohamed Kacimi L'APARTHEID INFLIGÉ AUX PALESTINIENS DANS LES PAYS ARABES

Jordanie : 1967: la Jordanie a refusé d'autoriser les habitants de Gaza qui sont venus après la guerre des Six Jours à devenir des citoyens jordaniens . Aujourd'hui, quelque 165000 Palestiniens en Jordanie ne peuvent pas devenir des citoyens ni obtenir aucun des services gouvernementaux .

1970: 3500-5000 Palestiniens ont été tués et 20 000 Palestiniens expulsés , leurs camps démolis, dans les événements de Septembre Noir .

1988: la Jordanie a révoqué la citoyenneté de millions de Palestiniens de Cisjordanie suite à leur déclaration d'«indépendance». Comme d'habitude, cette decision avait été justifiée comme étant pour leur propre bien .

2010: la Jordanie a continué à révoquer la citoyenneté pour des milliers d'autres Palestiniens

2012: la Jordanie a adopté une loi électorale qui limite de fait ( la région de Russeifa, 700 000 habitants, majoritairement des palestiniens citoyens jordaniens, n'est représentée que par 2 députés) le nombre des membres palestiniens du Parlement à moins de 10 %

2013: la Jordanie met les réfugiés palestiniens de Syrie dans des camps spéciaux qu'ils ne peuvent pas quitter , séparés des autres réfugiés , et renvoie des centaines ou des milliers d'autres en Syrie, vers les périls de la guerre.

2014 : Les Palestiniens qui sont citoyens se voient encore refuser l'égalité des droits dans l'armée , pour ​​l'obtention de bourses d'études et l'admissions dans certaines universités publiques , entre autres domaines .

Egypte : 1948: Tous les réfugiés de Palestine qui ont atteint l'Egypte avaient été internés dans des camps et les hommes ont été contraints de retourner en Palestine pour combattre .

1949: Expulsion de tous les palestiniens des camps égyptiens vers Gaza . Très peu d'Arabes palestiniens ont été laissés en Egypte .

1949-1967 Loi martiale et couvre feu imposés à Gaza

1950: l'Egypte a refusé toute présence de l'UNRWA sur son territoire , la reléguant à Gaza . Privant ainsi les réfugiés palestiniens restants de toute aide.

1949 - 1956 : Les Palestiniens en Egypte ont été interdits de scolarité et l'emploi.

2013: Des centaines de réfugiés palestiniens de Syrie ont été placés en prison alors qu'ils tentent d'entrer en Égypte

2013- aujourd'hui : l'Egypte a pratiquement fermé la frontière de Rafah avec Gaza , même en limitant les patients hospitalisés de voyager , emprisonnant de fait 1,7 millions de Gazaouis .

Liban :

1950-1958 : A délivré des documents de voyage à sens unique pour les Palestiniens pour quitter le pays

1962 Les Palestiniens ont été classés comme des «étrangers» : 73 catégories d'emplois avaient été interdites aux Palestiniens jusqu'en 2010 , maintenant ce sont "seulement" 50 emplois qui leurs sont inaccessibles-comme aux étrangers , alors que la plupart est née au Liban de parents nés eux aussi au Liban! Ils sont toujours interdits de travailler comme médecins , journalistes , pharmaciens ou avocats . Ils ne sont pas autorisés à construire de nouvelles maisons ni propriétés, ni même de réparer leurs maisons.

La loi martiale est imposée dans les camps de réfugiés . L'Armée empêche les gens d'entrer et de sortir. Limitations des écoles pour les «étrangers» palestiniens. Ils ne sont pas autorisés à vivre à l'extérieur des camps de réfugiés , qui à leur tour n'ont pas le droit de s'agrandir . La population des camps est maintenant le triple de l'origine. Les Palestiniens ne sont pas autorisés à créer des organisations .

1975-1978 : Au moins 5000 Palestiniens ont été tués dans la guerre civile libanaise

1985-1988 : des milliers de morts dans la «guerre des camps

1995 : la loi interdit aux Palestiniens d'entrer dans le pays sans visa , et les visas n'ont pas été délivrés . Les palestiniens originaires du Liban qui avaient travaillé puis qui ont été expulsés des pays du Golfe ne pouvaient pas retourner au Liban . (Loi abrogée en 1999 . )

2005: Des lois spécifiques interdisant aux étrangers qui ne sont pas «les ressortissants d' un État reconnu » - les Palestiniens - de posséder des biens . Celui qui en possèdait précédemment ne peut plus le transmettre à ses enfants.

2007: 31 000 Palestiniens sont sans abri parce que l'armée libanaise a détruit le camp de Nahr el Bared

2013: Les quelque 50 000 réfugiés palestiniens en provenance de Syrie sont traités différemment des autres réfugiés syriens ; les visas temporaires de trés court terme et coûteux en font de fait des criminels

2013: Le Liban commence à refouler les réfugiés palestiniens de Syrie à la frontière

Koweït :

1991 : 400 000 Palestiniens ont été harcelés et chassés du pays .

Libye :

1994-5 : Expulsion de 30 000 Palestiniens , un grand nombre a été chassé de leurs emplois et leurs maisons confisquées Les pays arabes ont refusé de prendre des nouveaux réfugiés . Des centaines ont été bloqués dans le désert ou sur la mer. . Finalement, la Libye a permis à certains de rester mais a gardé la menace de les expulser à nouveau . En fin de compte environ 15 000 ont été forcés d'aller aux pays arabes pour lesquels ils avaient des documents que ce soit des pays du Golfe, et les pays occidentaux .

2011: les Palestiniens ont été forcés de payer un impôt spécial de 1550 $.

2012: Beaucoup de Palestiniens ont perdu leurs maisons et des propriétés ont été revendiqués par d'autres , dans le sillage de la révolution et de l'effondrement du système judiciaire .

Irak :

Début des années 1950 : Expulsion des travailleurs palestiniens en grève , avec l'Arabie Saoudite et la Libye ..

2005: Après que Saddam Hussein soit chassé du pouvoir , les Palestiniens en Irak ont été soumis à l'enlèvement , la prise d'otages , le meurtre et la torture par des groupes armés . Les politiciens eux s'en moquaient . Environ 15 000 ont été forcés de quitter l'Irak . Des milliers ont été bloqués dans des camps dans le désert entre l'Irak et la Syrie , car aucun pays arabe ne leur avait accordé de visa.

Qatar :

1994 : Refus d'accorder des visas aux travailleurs Palestiniens.C'est en Janvier 2014 qu'enfin ce pays leur accordera 20 000 visas.

Syrie :

1970: les Palestiniens ne peuvent pas voter , ne peuvent pas se présenter aux élections , ne peuvent pas posséder des terres agricoles , ne peuvent détenir plus d'un bien ..

2005-2008: la Syrie n'a pas permis aux milliers de réfugiés arabes palestiniens fuyant l'Irak d'entrer dans le pays .

2012- aujourd'hui: Quelques 2000 Palestiniens ont été tués jusqu'à présent dans la guerre de Syrie . Environ 50 sont morts de faim alors que l'armée interdit l'entrée de tous les aliments et de l'eau dans le camp de Yarmouk . Leurs droits ont été restreints d'avantage et le restant de moins en moins appliqué.

Comment le monde arabe a perdu ses Juifs

Nathan Weinstock est un avocat, criminologue et historien belge né à Anvers en 1939. Après une scolarité juive orthodoxe il se tourne vers le trotskisme, devient en 1967 antisioniste et pro-palestinien, et se répand en harangues devant des auditoires nourris aux émissions de Radio-Le Caire, « savourant avec délices l’annonce que les vaillantes armées arabes sont sur le point de jeter les Juifs à la mer ». D’une violence verbale extrême, Weinstock appelle au démantèlement d’Israël en posant qu’on ne peut être à la fois sioniste et socialiste.

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Vers les années 1990 il change de cap en prenant conscience du fait que la cause palestinienne n’est qu’un avatar de l’antisémitisme, et qu’elle est nourrie par la haine des Juifs plutôt que par une vision politique. Weinstock fait alors un virage à cent quatre-vingt degrés et se met à soutenir Israël en déconstruisant avec lucidité et courage son parcours d’intellectuel fourvoyé dans le dédale du marxisme, considérant ses écrits antérieurs comme « bourrés de conclusions simplistes et abusives ».

Weinstock publie en 2008 un essai [1] sur la disparition des communautés juives du monde arabe. Ce gros ouvrage parait maintenant en hébreu, à l’occasion de quoi le quotidien israélien de gauche « Haaretz » consacre un article dans son supplément de fin de semaine. Ce qui suit n’en est pas une traduction littérale, mais reprend l’essentiel du propos, à savoir l’évocation par Weinstock du statut de « Dhimmi » dans le monde arabe.

Le statut de « Dhimmi » constituait en principe une forme de protection des non-musulmans monothéistes, mais au prix de règles infamantes telles que l’interdiction de posséder des armes, de témoigner au tribunal, de monter à cheval, de l’obligation de porter des signes distinctifs, d’être assujettis à une taxe spéciale et de veiller à ce que les habitations soient plus basses que celles des musulmans. Au Yémen les « Dhimmi » juifs avaient pour tâche de vider les fosses d’aisance et de dégager les cadavres d’animaux encombrant les routes.

Au fil du temps ces usages ont diminué ou ont disparus, mais les esprits continuent à en porter l’empreinte. Que les règles concernant les « Dhimmi » soient appliquées ou pas, elles subsistent de manière symbolique dans de larges franges de l’inconscient collectif arabe et y pérennisent une image de soumission au pouvoir musulman.

L’histoire des Juifs du monde arabe est une tragédie. Des communautés entières installées depuis des temps immémoriaux ont été traquées, chassées ou éliminées dans l’indifférence la plus totale de la Communauté Internationale, auprès de laquelle les Juifs en déshérence n’ont jamais obtenu le statut de réfugiés, contrairement aux palestiniens, chez lesquels ce statut se transmet de génération en génération.

En 1945 il y avait dans le monde arabe près d’un million de Juifs. Il en reste quelques milliers, essentiellement au Maroc. La manière dont ils ont été délogés diffère d’une région à l’autre, mais le dénominateur commun en est un antisémitisme remontant à l’époque du Prophète, qui avait voulu dans un premier temps rallier les Juifs à l’Islam, mais qui s’est retourné contre eux quand il a pris conscience qu’il n’y parviendrait pas.

L’idée que les Juifs sont partis du monde arabe parce qu’ils étaient sionistes est un mythe. La majorité ne l’était pas, et ne s’est expatriée que contrainte et forcée, abandonnant tout pour recommencer une vie nouvelle ailleurs. Ils étaient pourtant attachés à la culture arabe, à laquelle ils avaient largement contribué. La présence des Juifs datait d’ailleurs souvent d’avant celle des arabes eux-mêmes.

C’est en considérant les rapports entre la minorité juive et la majorité musulmane que l’on comprend le séisme qu’a constitué l’avènement de l’Etat d’Israël dans la psyché des masses arabes. Celles-ci portent en elles de manière plus ou moins marquée la mémoire de cette période où les Juifs pouvaient être humiliés et spoliés en toute légalité, ce qui explique leur regard incrédule sur l’Israël d’aujourd’hui, qui leur échappe et dont ils souhaitent la disparition, tâche à laquelle ils sont disposés à consentir des efforts qui ne débouchent sur rien d’autre que leur propre affaiblissement.

Quand les puissances coloniales ont voulu mettre un terme à la dhimmitude cela fut ressenti comme une atteinte à la dignité arabe et comme une violation de l’ordre divin. D’une manière générale la notion occidentale de droits de l’homme fut considérée comme incompatible avec les valeurs de l’Islam, ce qui est d’ailleurs encore le cas dans une grande partie du monde arabo-musulman.

Quand à l’aube du vingtième siècle les Juifs se sont mis à pratiquer l’agriculture intensive en Palestine ils décidèrent de remplacer les gardiens arabes par des Juifs. Ce changement fut vécu par beaucoup d’arabes comme un insoutenable retournement de situation. Alors que dans leur esprit les Juifs n’avaient pas vocation à être paysans ni à porter des armes, ce nouvel ordre – celui de la modernité – s’édifiait sous leurs yeux en lieu et place de l’ordre ottoman en perte de vitesse. Cet avènement d’un « Juif Nouveau » dépassait l’entendement de l’opinion publique arabe, pour laquelle la soumission des Juifs allait de soi et découlait en quelque sorte d’une loi de la Nature.

L’impasse du conflit israélo-palestinien perdure – au moins en partie – parce que du point de vue arabe la création d’Israël est perçue comme une vengeance des Juifs eu égard à leur servitude passée, alors qu’en réalité le sionisme n’est qu’un mouvement de libération nationale. C’est l’inaptitude ontologique à admettre que le mouvement sioniste a mis fin à la dhimmitude en Palestine qui est la cause profonde du refus arabe de se conformer à la Résolution de l’ONU de 1947 recommandant de la partager en deux Etats, l’un juif et l’autre arabe.

[1] Une si longue présence : Comment le monde arabe a perdu ses Juifs, 1947-1967, (Editions Plon)